Très belle performance de Philippe Lelièvre qui donne à chaque personnage un physique, une humeur et une personnalité. La représentation oscille entre la construction d'une pièce et l'improvisation d'un stand up. En résulte une histoire hybride pleine de moqueries et de répliques drôles et où l'intrigue finit par se perdre en tranche de vie. L'important n'est pas la pièce mais le jeu. # écrit le 14/03/22
L'occasion d'une petite soirée romantique en couple. Les paillettes sont là pour accompagner quelques beaux numéros d'athlètes sensuels, celui de la baignoire notamment. Le diner reste somme toute très ordinaire et le scintillement de "L'Oiseau Paradis", bien que plaisant, n'aveugle pas. Une revue romantique certes, qui manque d'un brin de Rouge Féérie et d'élégance Crazy. # écrit le 18/02/22
Bien heureuse l'âme initiée aux délices grisantes de l'absinthe qui goûtera la lumière distillée des illuminés vacillants. Pour les autres, pauvres fous amateurs de clarté et condamnés à l'aversion de l'impénétrable, mieux vaut encore laisser l'hermétisme fielleux aux limbes au risque de prendre des vers abyssaux pour de vertigineux verbiages. # écrit le 17/02/22
Les Coquettes offre un pétillant récital aux notes provocantes qui s'amusent à mettre les pieds dans le plats en chanson. Décomplexé mais un peu convenu dans certains propos féministes mais gay-friendly, le show offre cependant de bons moments de rires, des mélodies entêtantes et quelques textes touchants. La, la, la... # écrit le 17/02/22
"Le mystère de l'aviateur" est une très belle histoire où l'improbable réalité est bien plus forte que la plus construite des légendes. Casse-cou, aventurier, rêveur, frimeur, séducteur, poète, écrivain, pionnier, espion, pilote, libre, engagé, patriote... tout y est. Alexandre Dumas n'aurait probablement pas imaginer un héros plus romanesque et déterminé que cet incroyable français du monde entier. De Paris à New-York, l'héroïsme côtoie le tragique dans cette vie originale passée en l'air et cette mort mystérieuse engloutie au fond de la mer. Élucidée en 2008, soit 64 ans après sa disparition, la mort de Saint-Ex est une nouvelle source de réflexion et d'inspiration, tant elle paraît réussie et à la mesure de son existence. Malgré la légère lourdeur du personnage adolescent inutilement "banlieurisé" pour plaire au jeune public, la mise en scène d'Arthur Jugnot est soignée et cinématographique. Elle nous offre une jubilatoire opportunité de découvrir le rocambolesque parcours, inspiré et atypique, de Saint-Exupéry. Qui sait s'il n'a pas encore quelques secrets à révéler. # écrit le 17/02/22
Quelle magnifique idée que de mettre en lumière, de façon subtile et bienveillante, la difficulté de trouver l'amour lorsqu'on vit avec un handicap quel qu'il soit. Expliquer le regard des autres qui se détourne, les préjugés qui se pensent à voix basse, le malaise silencieux et la sensation d'être observé de biais comme une bête de foire, mais aussi montrer la condescendance ou au contraire l'exclusion alors que l'indifférence désintéressée et naturelle suffirait à rendre les jambes, les yeux, voire à donner des ailes... ou tout bonnement la sensation d'être ensemble avec quelqu'un. "Le jeu de la vérité" est donc une pièce essentielle qui gagnerait peut-être à alléger les facéties qui nuisent à la cohérence d'une intrigue déjà alanbiquée et à supprimer les quelques grivoiseries complaisantes qui ne peuplent assurément pas (il me semble) les soirées entre potes adultes même si ces quatre-là ne brillent pas par leur franchise ou leur maturité. Mais je suis peut-être déjà un vieux canard boiteux. # écrit le 16/02/22
Un huis-clos intelligent entre un impétueux Président de la République et un psychiatre consciencieux qui n'a que faire de la pompe. C'est un gouffre abyssal qui sépare ces deux tempéraments qui doivent pourtant apprendre à se respecter et à se connaître. Installé dans un grandiose décor reconstituant le bureau de l'Elysée, François Berléand et Antoine Dulery donnent corps et vie à cette magnifique catharsis où la confrontation, l'échange puis le travail psychologique sont tour à tour drôles, subtils, profonds et touchants. Aucune fausse note dans le jeu d'acteur qui irradie par sa justesse, sa précision et la maitrise parfaite du texte où les répliques fusent avec un naturel déconcertant. Un théâtre aux lettres de noblesse indiscutables qui se donne d'une traite, sans pause ni filet, et qui rappelle que c'est un art d'être acteur professionnel. # écrit le 16/02/22
Un instant de culture générale mis très sobrement en scène pour ne laisser dans la lumière que l'éclat d'une vie faite de choix volontaires, d'opportunités saisies et de défis personnels. Si l'Histoire et le Panthéon ne devaient immortaliser que l'oeuvre politique, le théâtre, lui, ressuscite la femme dans son intimité et ses convictions. Il offre aux spectateurs une proximité incandescente, éphémère et prégnante comme les volutes de la fumée d'une de ses cigarettes. # écrit le 16/02/22
"La machine de Turing" est une formidable descente aux enfers. Les comédiens irréprochables transcendent les rouages d'une folie obsessionnelle condamnée au succès par la mécanique d'un temps accéléré par la guerre. La progression de l'intrigue s'avère savamment itérative et captivante pour retranscrire de façon non linéaire le destin du britannique Alan Turing. Héroïque et tragique, ce mathématicien, cryptologue et héros de guerre contribua aux intelligences décisives qui déterminèrent l'issue de la seconde guerre mondiale. Oublié du grand public en raison de son homosexualité, la pièce nous démontre presque scientifiquement à quel point notre liberté quotidienne est pourtant redevable aux travaux de ce visionnaire tourmenté et réhabilité à titre posthume par la Reine d'Angleterre en 2013. La mise en scène et le décor sont spectaculaires, peut-être même démentiels, pour donner vie à ce balbutiant monde artificiel, impénétrable et tortueux dont les capacités infinies déjouèrent la solution finale. Un nouveau monde calculateur à l'intelligence déconnectée des limites de ses fragiles créateurs et que les générations futures apprendront à domestiquer dès leur enfance. # écrit le 16/02/22